enc...de mouche et torchage de mollusques
Ainsi voilà que Guiguite a réussi a rentrer dans une belle cuisine, une étoile au michelin, si si si.
Donc je n'ai pas encore pu gravir les échelons de la gloire et faire valser les poêles avec aisance, non certes non mais je suis dévolue à la noble tâche de l'extraction des mollusques.
J'ai épluché des bigorneaux, des bulots et des coques. Ces bêtes ont un naturel confiant et le regard caressant, par temps de grand vent et en haute mer.
En réalité, d'aucuns croient qu'ils attendent la mort en silence, faisant ainsi preuve d'une grande abnégation.
Or il advint que ces pauvres créatures furent capturées, enlevées à l'affection des leurs et, enfin, livrées à la barbarie des cuisiniers. Elles finissent lamentablement sur ma planche et c'est là que démarre l'opération "nettoyage de caca".
En effet, les études conchillicoles ont démontré leur fonction défécale exacerbée.
Eh oui! si vous mangez des bigorneaux, des bulots ou des coques, comme ça, groumpf, à la va-comme-j'tepousse eh bien vous pratiquez tout bonnement la coprophagie.
C'est donc avec une
cruauté sans égal que je les extraie de leurs coquilles et que j'en enlève la moitié, constituée de caca.
Ensuite
je dois subir l'acrimonie du chef qui vérifie mon travail et constate les failles tout en me les reprochant vertement.
Il s'agit d'un monde très hiérarchisé dont le principe est très simple : tout le monde a un chef et est également le chef d'une strate inférieure.
Et le chef gueule sur celui qui est en dessous et le vilipende
jusqu'à ce qu'il se fasse vilipender à son tour par son chef à lui.
Bien
sûr il y a les deux extrêmes qui échappent à la règle, c'est à dire le
grand chef, bien entendu, et les plongeurs, les noirs qui font la
vaisselle, eux ne peuvent pas vilipender car ils sont tout en bas.
De toutes façons, ils s'en foutent et sont dans un local à part et passent leur temps à se parler dans une langue
étrange, un méchant sabir qui doit être l'équivalent du ch'ti mais plutôt en malien, c'est donc du picard malien, langue obscure que personne n'a jamais comprise.
Après les épluchages de légumes et
torchages de coquillages, on va manger vers 11h00, un des cuistots a
préparé des trucs délicieux.
Le rite est immuable, chacun va s'assoir avec sa pitance et se goinfre en silence et en 10 minutes, le silence est juste rompu par des "bon appétit" de ceux qui s'installent et tous répondent "merci, toi de même" en choeur avec exactement la même intonation que "et avec votre esprit".
Pendant le service, ça court dans tous les sens et le grand chef hurle ses
ordres et là, tout le monde répond "OUI CHEF !" très fort et s'active. Et
vers 14h15, 14h30, on lave tout.
On
jette de l'eau partout et on passe la raclette, je ne suis pas forte en
raclette, ce qui m'a valu les amers reproches de mon caporal. mais j'ai appris, je pense que j'aurai bientôt mon diplôme
de raclette comme j'avais eu mon diplôme de pizza.
En réalité, un des apprentis, à peu près à mon niveau, un grouillot quoi, a eu pitié et m'a expliqué le maniement de la raclette. Il m'a donc communiqué un moyen mnémotechnique issu de Quantico, infaillible quoi : "une raclette, c'est comme une femme, ça s'tire!" A la bonne heure, cela restera gravé dans ma mémoire.
Pause jusqu'à 17h et v'là que c'est le même bazar jusqu'à 23h ou 23h30.
Guiguite grouillote